GROSSOPHOBIE :

Aimer un corps gros mais vouloir le changer : grossophobe ?

Comme vous le savez, je suis en plein protocole sleeve. Je fais actuellement 108 kg, pour 1m59. Je suis donc considérée comme étant en obésité morbide.

Et c’est là que mon cœur balance. J’aimerais crier au monde entier que je suis bien dans corps, que je peux faire le poids que je veux, ça ne change rien à qui je suis. J’aimerai prôner l’acceptation de soi. Se trouver belle quelque soit son poids. Une belle femme ne porte pas forcément du 36 ou du 38.

Quand je vois toutes ces vidéos de femmes fortes qui encouragent l’acceptation de leurs corps et de leurs rondeurs, j’ai envie de crier OUI !! J’ai envie de me sentir belle AVEC mes kilos. J’ai envie de combattre auprès de toutes ses personnes pour que les personnes obèses soient traitées, et regardées comme n’importe quelle autre personne.

Pourtant aujourd’hui je prends la décision drastique de perdre ce poids que j’aimerai accepter et assumer. C’est toute l’ambigüité de la chose : comment arriver à s’assumer, alors que je cherche à perdre du poids. Comment continuer à prôner que le poids n’a pas d’importance, et qu’il nous faut nous aimer tels que nous sommes, alors que je cherche justement à changer ce corps.

Arriver à accepter qu’être gros n’est pas une insulte, mais juste un adjectif. Alors que je n’arrive toujours pas à aimer mon corps…

Je veux lutter contre la grossophobie, car pour l’avoir vécue, c’est harde, ça n’aide en rien la personne, voir ça aggrave le problème.

Voyez comment j’utilise naturellement le terme de « problème ». Être gros ne devrait pas l’être. Pourtant il le devient à partir du moment où la personne se sent mal. Et qu’est ce qui la fait se sentir mal en général ? Le regard des autres. Je suis donc profondément persuadée qui si le regard des autres changeait, plus de personnes rondes pourraient s’accepter. Et après ?

Parce que quand je parle de problème en fait, je ne parle pas du poids de la personne, mais d’un éventuel trouble alimentaire. Si tu es ok avec ton corps et ton alimentation, alors il n’y a AUCUN problème, quelque soit ton poids.

Les difficultés arrivent quand ton poids te gène au quotidien, qu’il devient un handicap et t’empêche de vivre la vie que tu souhaites. Ça devient un problème quand tu développes des soucis de santé, ou que ton surpoids découle d’une maladie. C’est compliqué quand ton surpoids est le résultat de troubles alimentaires, de stress, d’angoisses, de mal être.

Quand je dis que ça aggrave le problème, je parle de ce qui est à la source de la prise de poids non voulue. Typiquement, la culpabilité au CŒUR des troubles du comportement. Et les jugements, critiques, mises à l’écart, ne font qu’aggraver cette culpabilité, pour finalement nous enfoncer dans les TCA, et la prise de poids.

Suis-je légitime pour parler de grossophobie, et lutter contre ?

Alors j’aimerais pouvoir dire « restons gros », restons comme nous sommes !!! Mais ce n’est pas si simple. J’ai passé presque toute ma vie, de mon adolescence à maintenant, à me dire que quand je serais mince, je pourrais enfin vivre. Je pourrais devenir la personne que je rêve d’être, et que je serais enfin heureuse. Or, je n’ai fait que prendre du poids depuis. Et quand je regarde de vieilles photos, je me demande comment je pouvais me trouver grosse. Alors je me leurre à nouveau, en me disant, cette fois ci se sera différent. Ayant connu l’obésité, je pourrais apprécier d’être plus mince, et me sentir « fraîches » malgré mes rondeurs. Mais c’est faux. En vrai je continue à attribuer mon bonheur et la réussite de ma vie à mon physique. Or je viens de réaliser TRES récemment (un peu tard quand même comme réflexion), que ce n’est pas ma perte de poids qui me rendra heureuse. Ce qui le fera en revanche, c’est d’apprendre à vivre pour moi, à réaliser mes rêves, à avancer et apprendre de nouvelles choses constamment.

Alors pourquoi faire l’opération me direz-vous ? Si perdre du poids ne me rendra pas plus heureuse, pourquoi vouloir en perdre ? Je vais le faire pour mon bien être, mais pas pour mon bonheur. J’ai envie de retrouver un équilibre dans ma vie, prendre soin de mon corps ET de ma tête. Et je sais que les kilos que j’ai imposés à mon corps ne me font pas du bien. Il fatigue, et me dit STOP. J’ai envie de le soulager. J’ai envie qu’il puisse à nouveau se mouvoir sans souffrir.

Mais je ne le fais pas ni pour mon bonheur, ni pour être plus belle (je le suis déjà 😉).

Mon coup de Gueule :

Et honnêtement, je me suis longtemps trouvée hypocrite à vouloir lutter contre la grossophobie, alors que je n’acceptais pas mon corps. Pourtant si, je suis totalement légitime dans ce combat. Je maintiens que toute personne vivante, quel que soit son physique, devrait pouvoir se sentir à sa place dans la société. Je maintiens qu’il n’est pas normal que nous continuions à promouvoir des corps qui ne correspondent même pas à la réelle moyenne française, et par là même, à créer des complexes inutiles.

J’ai envie de CRIER à toutes les femmes que nous sommes toutes différentes, et que nous n’avons pas besoin de faire un 36 pour elle belle.

J’ai envie de rappeler à toutes les femmes que c’est NORMAL d’avoir des formes à certains endroits. Et que de ne pas en avoir ça l’est aussi 😊. Nous ne DEVONS pas être tous identiques. La nature a besoin de diversité pour fonctionner. Et c’est aussi le cas pour nous.

J’ai également envie de maudire toutes ces personnes qui se disent bienveillantes quand elles viennent te « prévenir » que tu as pris du poids, parce que c’est pour ton bien… NON, ce n’est PAS pour mon bien, c’est pour le tien

t !! Se sont tes propres angoisses que tu projettes sur moi. Alors GARDES LES, j’en ai assez des miennes !

J’ai envie d’envoyer chier toutes les personnes qui osent traiter les « gros » de flemmards, de lâches, et qui pensent que « c’est pas compliqué quand même de perdre du poids, il suffit de se prendre en main ». Mais TAIS TOI, tu ne sais rien de la personne que tu as en face de toi !!! Ni de ses combats ! Tu n’as aucune idée de l’énergie que ça demande de se lever tous les matins avec 30 kilos de trop. Tu n’as aucune idée de la force qu’il faut pour suivre un rythme « «normal» » quand tous tes mouvements te font souffrir. Tu n’as aucune idée de ce que c’est de devoir se priver (si ça tu sais sûrement), quand ta seule façon de fonctionner correctement c’est de manger pour avancer.

Je trouve inadmissible que l’on puisse juger, critiquer, ou ne serait-ce qu’émettre un avis (qu’il soit positif ou négatif d’ailleurs) sur le corps de quelqu’un. CA NE VOUS REGARDE PAS. Si la personne a des doutes, qu’elle se sent mal, elle viendra vous parler. Si votre avis n’est pas sollicité, alors TAISEZ-VOUS. Je crois qu’on ne se rend pas compte de l’impact de ces paroles blessantes. Et par expérience, je peux vous garantir qu’AUCUNE d’entres elles ne m’a fait avancer. Au contraire !!!

Alors oui j’aimerais voir plus de « gros » représentés dans la société. Et non, ce n’est pas promouvoir une vie malsaine. C’est juste montrer la réalité de notre vie. Tout le monde n’est pas mince. Alors acceptons le, et faisons avec. Si, et seulement si, la personne a en effet un train de vie déséquilibré pouvant remettre en question sa santé, alors seul un médecin pourra intervenir. Nous n’avons pas à dire d’une personne avec des « kilos en trop » qu’elle n’est pas en bonne santé, et qu’elle ne montre pas le bon exemple. Je connais des personnes avec des rondeurs, qui sont en bien meilleure santé physique ET mentale que d’autres qui peuvent se « vanter » de rentrer dans un 36… alors attention aux jugements, dans un sens comme dans l’autre. Je ne dis pas qu’un 36 est « anormal ». Je dis juste que sans être médecin, et sans connaître les éléments médicaux d’une personne, il ne nous appartient pas de juger de la santé d’une personne à travers son physique.

Oui, je suis un peu agressive. J’ai trop souvent subi. Car la grossophobie est d’une violence sans nom, et elle est partout. Même moi, je dois me remettre en question continuellement. Et je sais que je continue à avoir des réflexions grossophobes. Elles sont tellement encrées en nous, nous avons grandi avec des idées grossophobes. Et c’est un réel exercice mental que de s’en extraire. Mais c’est totalement NECESSAIRE. Autant pour arrêter de faire autant de mal aux gens, que pour apprendre à s’aimer à nouveau correctement.

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